IRONIE numéro 79 - Supplément "Anonymat, travaux pratiques"
IRONIE
Interrogation Critique et Ludique
Parution et mise à jour irrégulières
> Supplément du numéro 79,
Anonymat
, travaux pratiques

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IRONIE numéro 79, Octobre 2002


A N O N Y M A T
et falsification identitaire du sujet de l'écriture :
Travaux Pratiques

Ainsi soit-il, sorte d'ironie du sort en soi

 

  L'ANONYMAT ME GENE, CHERE IRONIE.  

Amant
Néophyte
Usurpe
Sodome

  PLUS, IL ME MET CARREMENT MAL A L'AISE.  

Humour
Urticant
Ironique
Tentateur
RÉSISTE !
Empédocle
Silencieux

  JE CROYAIS QUE CE SERAIT UN JEU,  

Alcoolhic

Bordel
Où c'est qu'j'ai foutu
Mes clops
Merde
Putain
Dans c'te poche
Bordel
Ah la garce
Où c'est-y qu'e' sont fourrées
Putain
Merde
Où c'est que j'les ai laissées
P'us un rond
Merde alors
Z'ont dû rester sur le zinc
Bordel
Faut que j'y retourne
Ah merde
Bordel de dieu
J'étais pourtant bien parti

  MAIS J'AVAIS MAL EVALUE MES CAPACITES DE JOUEUR.  

Les pommes. Ca fait du bien. Au point où elle en est. Mais ça le fait.
Fromage. A la fin du repas. Comme toi, mémé, pauvre conne. Petite vie
réglée. Dégage. Viande, ça me fait gerber. Bifteck. Ils mangent ça, les
autres. Pas faim. Faire comme si. Lessive. Il me faut de la lessive. Laver
ces sales draps. Comme si j'en avais quelque chose à foutre. Qu'il aille se
faire foutre. Foutre. J'm'en tape de tout ça. Comme si. Lessive. Sopalin.
Elle prend ça la mémé. Cirage. C'est pas lourd. Comme si. Maryse arriva au
rayon vins et spiritueux. Elle se détendit, se sentit mieux. Elle
connaissait le rayon par cœur, mais elle prit son temps, et fit semblant de
choisir, de s'intéresser aux prix, de comparer. Whisky, un et deux, je
reçois ce soir. Imbécile. Rosé, blanc, un, deux, flacon de rhum, trois.
Bière. Mélange détonnant. Peu de bouteilles. The truc : mélange. Avec cendre
de cigarettes. Et alcool à 90°. Ni vu ni connu. Je suis là incognito. Peu de
bouteilles. Réserve pour longtemps. C'est lourd. Vacherie de vacherie.
[...]
Épuisée, Maryse dut s'asseoir sur le banc public situé à mi-chemin entre le
supermarché et son immeuble. Marre. Chienne de vie. J'commence à en avoir
marre. J'peux pas rester là. Et puis j'm'en fous. Tous des cons. Maryse
sortit le flacon de rhum, parce qu'elle savait qu'il était facile à
déboucher. Elle en but une rasade. J'm'en fous de ces cons. S'ils savaient.
Tous des cons. Marre. Rentrer. Allez. Merci pour la promenade. Air pur.
Petits oiseaux. Cui-cui. J'm'en fous. Merde, trop lourd. Maryse jeta le
paquet de lessive et la viande. Bordel.
[...]
Courses. Crevée. Ascenseur. 8. Lumière. Clef. Serrure. Poignée. Porte.
Maryse referma la porte derrière elle et s'assit dans l'entrée à côté de son
cabas. Dix minutes plus tard, elle but le rhum du flacon, prit une pomme
dans le sac qui se trouvait au fond du cabas, et la mangea. Elle resta là
pendant deux heures, sans rien faire, hébétée. Reste calme. Vide. Mourir.
Marre. Néant. Maryse ne souffrait pas, ne sentait rien. Connerie. Triste.
Seule. Maryse était seule et ne pensait plus à rien.
[...]

  UN MINCE FILET DE SUEUR, FROIDE, PIQUANTE, COULE DANS MON DOS.  

Amour

l'amour le matin, au réveil, après une nuit dans les bras l'un de l'autre. Faire l'amour pour éprouver ton corps. Faire l'amour. Faire l'amour pour te prouver mon amour. Faire l'amour pour m'enfoncer dans ton odeur. Faire l'amour pour la dernière fois avec toi. Faire l'amour par habitude. Faire l'amour avec l'énergie du désespoir. Faire l'amour l'après-midi, jusqu'à satiété, au-delà de la satiété, jusqu'à plus soif. Faire l'amour pour tenter d'accéder à cet inaccessible ailleurs. Faire l'amour pour ne pas débander. Faire l'amour pour reproduire cette étincelle de joie sublime hors mots, hors norme, hors raison. Faire l'amour pendant toute une journée, jusqu'à l'écœurement. Faire l'amour pour se quitter, pour faire lâcher prise à sa
raison. Faire l'amour dans un jardin. Faire l'amour pendant toute une nuit, lovés entre les songes et quelques instants de sommeil.

  MA PEAU S'ÉTOILE DE MILLIARDS DE FOURMILLEMENTS ACÉRÉS.  

Faire l'amour plutôt que boire. Faire l'amour pour s'abandonner. Faire l'amour sur le sol. Faire l'amour pour devenir fou. Faire l'amour comme on se raccroche à une bouée. Faire l'amour pour devenir animal. Faire l'amour pour ne pas se noyer, pour aspirer la vie. Faire l'amour dans l'eau. Faire l'amour pour se noyer, pour disparaître, fût-ce l'espace d'un instant. Faire
l'amour comme un instant sacré. Faire l'amour parce qu'on est bourré. Faire l'amour pour oublier. Faire l'amour pour sentir ton sexe sur mon corps, dans mon corps. Faire l'amour pour se prouver son charme. Faire l'amour dans une chambre. Faire l'amour pour oublier l'amour rêvé. Faire l'amour comme une initiation à une autre connaissance. Faire l'amour pour rompre l'enchantement de la séduction. Faire l'amour pour oublier l'amour perdu. Faire l'amour pour accéder à soi à travers l'autre. Faire l'amour et retrouver l'amour rêvé. Faire l'amour pour t'honorer. Faire l'amour par ennui. Faire l'amour pour l'appel des corps. Faire l'amour contre un rocher. Faire l'amour pour se faire plaisir. Faire l'amour par passion. Faire l'amour pour caresser ton corps. Faire l'amour sans passion. Faire l'amour pour que tu me fasses plaisir. Faire l'amour pour atteindre une chimère qui sans cesse s'éloigne, sans cesse se pose un peu plus loin. Faire l'amour pour te faire plaisir. Faire l'amour pour se détendre. Faire l'amour pour jouer. Faire l'amour dans un hôtel. Faire l'amour pour conjurer l'angoisse naissante. Faire l'amour parce qu'il le faut. Faire l'amour sans plaisir, comme un exercice de gymnastique. Faire l'amour pour se serrer très fort. Faire l'amour dans une forêt.

  MES CHEVEUX SE DRESSENT À LEUR RACINE.  

Faire l'amour pour se rassurer. Faire l'amour pour happer ton être. Faire l'amour pour s'évader. Faire l'amour par tendresse. Faire l'amour pour ce plaisir tout nouveau, cet émerveillement de te voir là dans le lit, si proche, ton corps, ta peau, la nudité qui émerge des draps. Faire l'amour pour réveiller ses sens. Faire l'amour dans un lit. Faire l'amour pour le désir. Faire l'amour pour ne pas être seul. Faire l'amour pour se sentir beau et fort. Faire l'amour par compassion. Faire l'amour pour tenter d'annihiler le fil du désir. Faire l'amour par tristesse. Faire l'amour pour vivre, et vivre, et vivre encore dans la force du désir. Faire l'amour pour pénétrer l'impénétrable secret, te rejoindre et te perdre à chaque fois. Faire l'amour pour essayer de te retenir. Faire l'amour pour assouvir le désir, l'espace d'un instant. Faire l'amour pour assouvir mon désir. Faire l'amour pour assouvir ton désir. Faire l'amour dans le noir face à soi-même. Faire l'amour pour magnifier notre amour. Faire l'amour pour te dominer. Faire l'amour dans le jour, pour le côté libertin et le jeu des tissus, sublime nudité. Faire l'amour dans des chiottes. Faire l'amour dans le noir en dormant, au pays de la fatigue, entre volupté sensuelle et volupté du sommeil. Faire l'amour, et puis être heureux. Faire l'amour dans le jour pour voir ton corps voir les parties de ton corps, voir ton visage qui s'éloigne quand nos sexes se rejoignent, voir ton âme s'envoler dans un autre ailleurs. Faire l'amour, et puis rire. Faire l'amour dans un couloir. Faire l'amour, et puis se sentir si triste, si seul.

  MON CŒUR SE SERRE, MA RESPIRATION SE FAIT RARE, CHAOTIQUE...  

Faire l'amour, et puis être sérieux. Faire l'amour, et puis être tendre. Faire l'amour pour tendre son être vers l'inaccessible rêve. Faire l'amour, et puis être joyeux. Faire l'amour, et puis pleurer. Faire l'amour, et puis être maladroit. Faire l'amour comme une détente. Faire l'amour comme un désastre. Faire l'amour, et puis sourire. Faire l'amour, encore et

  LES MOTS lettre anonyme APPARAISSENT ET, A LEUR SUITE, 
  UNE MULTITUDE D'IMAGES ET DE SENSATIONS DESAGREABLES.  

ART

L'ART EST PARTOUT

L'anar ignare rate le grand écart, mais pas le placard, et se scratche sur le carrelage, parasite ratatiné - carrément taré trash, celui-là ! Carnaval d'artifices avariés... Les carmélites baratinent les partisans bavards, les barbares marchent en canard. Le clébard vicelard, larve de rat, se marre. Cafard ou pétard sous le brancard, camarade ? Décharge la carafe dans le débarras !

LA CARESSE DU POIGNARD

  JE NE SUIS PAS DE TAILLE A LUTTER CONTRE LES SENSATIONS.  

ATMOSPHÈRE

[•*•] Allô ?... attends, j'suis dans le bus, là. J'te rappelle.
[•*•] Oui ?... C'est moi... Oui... Non... Non... Non... J'suis dans le bus... Oui... Trois cents euros, pas plus... Oui, c'est ça... Oui... D'accord.
[•*•] Allô ?... attends, j'suis dans le bus, là. J'te rappelle.
[•*•] Allô ?... C'est toi ?... Je croyais que tu étais parti... Non... J'avais pas les clefs... Non, mais tu sais... J'savais pas... J'peux ?... Non... Je sais... Comme tu veux, c'est dommage... Il faudrait qu'on se voie au moins... Non... Non... Non... Rappelle-moi... Tchao ! [•*•]Allô ?... attends, j'suis dans le bus, là. J'te rappelle.
[•*•] Allô ?... T'es où ?... Je suis dans le bus... Je rentre... dans cinq minutes... Surtout, n'oublie pas le pain... J'achète du vin en passant... On prendra les fleurs sur la route... Oui, c'est ça, des pâquerettes ! On s'arrêtera dans un pré entre la place des Vosges et Bastille, on a tout notre temps... Non, pas de problème... À plus !
[•*•] Allô ?... attends, j'suis dans le bus, là. J'te rappelle.
[•*•] Oui ?... O.K.... A Odéon... Y'a pas de lézard, j'y serai dans dix minutes... A tout de suite.
[•*•]Allô ?... attends, j'suis dans le bus, là. J'te rappelle.
[•*•] Allô ?... T'es où ?... Hein ?... On dirait pas ! j'entends des bruits de voiture... Hein ?... Oui, c'est mieux... Oui, t'as qu'à ramener des haricots, de la salade, du vermicelle, du sucre en poudre, tu sais la boîte crème, parce que la rose a un goût dégueulasse, tu te rappelles... oui, avec des pâtes, de la sauce tomate et du gruyère... non, c'est pas la peine... oui, et n'oublie pas de prendre de la lessive, il n'y en a plus, et aussi du papier pour les toilettes... rose, je préfère... dentifrice, savon, et des éponges aussi... attends, c'est mon arrêt. Je descends...
[•*•] Allô ?... attends, j'suis dans le bus, là. J'te rappelle.
[•*•] Alex, c'est moi, Lulu. J'en peux plus de ton répondeur à la con. Jamais tu réponds ? Je passe te voir ce soir, j'ai des trucs à te dire. Je t'embrasse.
[•*•] Allô ?... attends, j'suis dans le bus, là. J'te rappelle.
[•*•] Allô ?... Oui maman, c'est moi... dans le bus... juste après l'arrêt Palais Royal... je tourne maintenant... ne t'inquiète pas... je t'appelle dès que je suis arrivé... à
tout de suite... je t'embrasse, maman.
[•*•] Allô ?... attends, j'suis dans le bus, là. J'te rappelle.
[•*•] C'est moi... Je voulais te parler... Je t'en supplie...
[•*•] Allô ?... attends, j'suis dans le bus, là. J'te rappelle.
[•*•] Allô ?... Oui, c'est moi... Parle plus fort, j'suis dans le bus... j'entends rien... Hein ?... Sur le buffet, à côté des lettres... Hein ?... Qu'est-ce que tu dis ?... Articule... Puisque je te le dis !... Hein ? J'entends rien... Mets tes lunettes... Bon, ça va... Oui, c'est ça... A tout à l'heure.
[•*•] Allô ?... attends, j'suis dans le bus, là. J'te rappelle.
[•*•] Allô ?... allô ?... allô ?... Et merde !
[•*•] Allô ?... attends, j'suis dans le bus, là. J'te rappelle.
[•*•] Mélanie ?... ça va... On se voit quand ?... Non, tu exagères !... Demain, alors... Samedi ?... Pas avant ?... Bon, bon... Oui... Je t'embrasse.
[•*•] Allô ?... attends, j'suis dans le bus, là. J'te rappelle.
[•*•] Oui ?... bonjour madame Parmesan... oui, je suis dans le bus... oui, bien sûr... d'accord... à demain, au-revoir madame Parmesan.
[•*•] Allô ?... attends, j'suis dans le bus, là. J'te rappelle.
[•*•] Allô ?... Oui, c'est moi... Non, où veux-tu que je sois à cette heure-là ?... Évidemment !... Je suis parti à cinq heures un quart, comme hier, ça me fera arriver vers les
six heures... Tu rêves ?... Non, rien de spécial... Allez, je te laisse, il y a du monde... Oui, d'accord... Non, ne t'inquiète pas... C'est ça, c'est ça... évidemment... Moi aussi... Mais oui, mais oui... Allez, je te laisse, il faut que je raccroche maintenant... Mais non, qu'est-ce que tu vas t'imaginer ?... Allez, je raccroche... Gros bisous.
[•*•] Allô ?... attends, j'suis dans le bus, là. J'te rappelle.
[•*•] Alors, tu réponds des fois ?... Tu sais pas où est Julien ?... Merde... Faut qu'on le trouve avant... Hein ?... O.K.... À plus.
[•*•] Allô ?... attends, j'suis dans le bus, là. J'te rappelle.
[•*•] Allô ?... oui... attends, j'ai pas le temps, là, j'suis hyper-speed, j'ai un texte à finir... hein ?... qu'est-ce que tu dis ?... non ?! j'y crois pas ! Répète un peu... Attends, ça change tout !... Tout de suite si tu veux !... Où ça ?... O.K., j'arrive !
[•*•] Allô ?... attends, j'suis dans le bus, là. J'te rappelle.

Empédocle et Louis Zooka


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