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IRONIE numéro 50, Février 2000 CONJONCTIONS IRONIQUES |
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Supplément
du numéro 50, CONJONCTIONS IRONIQUES, la suite. |
1
Parole d'un observateur. Parole de la connaissance. Je le sais, je la vois.
2
Je l'entends. Je la respire. L'âme du citoyen lui est devenue intégralement
extérieure. Unis, et séparés. Il peut s'installer commodément
à l'intérieur de son intimité. Il s'assied, se love dedans
dessus. Il chatouille son âme.
3
Il roule dans son âme. Il la connaît, prie et joue avec elle.
Il roule avec quotidiennement. Il voyage en son âme en ce dimanche ordinaire
de la fin du vingtième siècle. Le citoyen se hâte.
4
Il possède une âme qui roule. Dualité vivante, ils roulent
vers l'église de leur dieu. Avec précaution et un très
grand respect, le citoyen s'avance et gare son âme le long du confessionnal
automatique. Il ouvre grand son cour et toutes les portes de son âme.
Rite sacré, la purification va avoir lieu.
5
Le citoyen entonne un hymne techno et son âme vibre à l'unisson
des façades et des vitres des maisons du quartier du temple. Le citoyen
verse son obole dans l'orifice de l'oreille unique et chromée du prêtre
robot confesseur. Ô merveille inouïe ! Souffle séraphique
qui s'exhale, mécanique mélopée mêlée de
stridences vigoureuses. Entendez !
6
Voyez aussi le long appendice vibrant du confesseur qui glisse, s'insinuant
dans les replis obscurs, s'agitant au sein des entrailles spirituelles. Pur
moment de grâce. L'âme se nettoie. La poussière retourne
à la poussière.
7
Le citoyen comprend que cette aspiration à la pureté est irrésistible.
Il doit donc se prosterner sur les coussins à l'intérieur même
de son âme. Son aide est juste et nécessaire. Il participe au
nettoyage, en agitant de ses mains l'extension caudale de son confesseur automatique.
8
Le citoyen bat la coulpe de son âme souillée, secoue les tapis
de prière sur les grilles métalliques du confessionnal. Tous
les déchets de sa malheureuse vie de pêcheur tombent dans les
limbes plastifiés, boîte de coke, préservatifs, cendres,
capsules de bière, mégots, chewing-gums roulés en boule,
desséchés, piles usagées et serviettes hygiéniques
emballées dans le plastique, crottes de nez, tickets de stationnement,
cotons-tiges jaunis et primes d'essence.
9
L'indulgence est plénière. Le confesseur ne laisse pas subsister
la moindre ordure. Tout est sucé. Tout est aspiré. La poubelle
du temple déborde. Au bout du rouleau, à bout de souffle, flapi,
le confesseur mécanique s'enroule sur lui-même. Fin du sacrement
de pénitence.
10
Le citoyen claque toutes les portes, referme les issues de son âme.
Il s'installe dans la conduite spirituelle, un intérieur brillant,
rendu à sa virginité. L'âme et le corps roulent lentement
vers la seconde chapelle, celle de la station baptismale.
11
Le sacrement continue. Il faut payer encore, expier en glissant les espèces
dans la fente astiquée du saint engin.
12
Dieu met la pression. Le citoyen braque le jet lustral vers la coquille de
l'habitacle spirituel. Le démon s'échappe des dessous empuantis
de l'âme dans un rugissement de rage.
13
S'évanouissent les boues. S'éclipsent les taches. S'effacent
les moustiques morts sur les yeux de l'âme. C'est le retour à
l'innocence première, au pur visage de l'enfance. L'âme scintille.
14
Dans un irrépressible mouvement, élan de repentir, le citoyen
s'agenouille.
15
Il caresse son âme avec un linge doux et parfumé. A l'issue de
cette longue caresse, il mène lentement son âme en dehors du
temple. Le rite sacré de la réconciliation est accompli.
16
Commence une autre semaine. Le citoyen purifié dans son âme rejoint
la maison, bercé par la techno-musique des sphères. Le boum
boum des basses célestes le fait vibrer au volant de l'âme renouvelée.
17
Mais déjà son âme commence à circuler dans les
flaques d'eau sale, écrasant aussi les déjections canines, ou
même à l'occasion, des petits humains trop téméraires.
Dimanche prochain, il lui faudra encore retourner au temple.
18
La recherche du salut est un sempiternel recommencement. Le citoyen vertueux
y croit. La télévision le lui répète et les affiches
publicitaires, tables de la loi divine, le lui rappellent.
19
Son âme lui donnera la joie de communier, un jour peut-être, avec
elle dans une belle envolée finale, la suprême joie de l'embrassade
avec un arbre, baiser de la vie éternelle, inscription dans le livre
des statistiques sacrées, ou mieux encore, l'expérience ultime,
la réunion avec une autre âme, propulsée comme lui, à
très grande vitesse, sur les chemins de la rédemption. Ce sera
le bonheur, fusion suave des citoyens fraternels.
20
En attendant ce jour sans doute encore lointain, le bon citoyen se hâte
vers la quiétude de sa maison terrestre, vers la bonne nouvelle qui
rassure, l'évangile véritable, parole de l'oracle télévisuel.
21
C'est un vrai soulagement de ne plus avoir à penser par soi-même.
22
Faire la volonté de son dieu, se conformer aux modèles sacrés
de la publicité, respecter la loi des représentants du peuple
dans la bonne république, ce sont les trois piliers de la démocratie
à visage humain.
23
Les citoyens ont raison. Ils sont dans la vérité. Ils sont la
raison agissante.
un poème n'est
pas une chaise conçu d'en haut un poème est un
croisement il suffit de le manger |
Bernard Noël |
C'est avant tout une expérience
de tous les endroits
aussi bien dans la simulation
que dans les zones les plus portées
à s'auto-découvrir
Si la fente est continuellement
irritée
faire preuve de naturel
l'exposer à l'air
et la laver
avec de légères sensations
Trait,
pointe, flèche, pique. L'ironie est à l'esprit ce que le
sexe est à l'homme.
L'interrogation
(?) et l'exclamation (!) ont leur point.
Pour l'ironie je propose
ou
.
"...
et aucun bavardage n'est sans risque"
"
Prends-y garde, ô ma vie absente ! "
"Comme
l'homme fout, il a voulu que son Dieu foutît également, ..."
"Son crâne est un dôme plein de réverbérations. Les creux de ses os, des galeries acoustiques. Il n'ose parler tout haut de peur d'être assommé par le bruit, comme l'homme dans la grosse caisse."
Chaque remise en mouvement suppose une étincelle-pulsion qui initialisera une incubation d'une durée de deux ou trois jours, n'entraînant un mouvement réel que si elle est alimentée par la multiplication des étincelles, désormais motrices.
Le mouvement ainsi déterminé pourra être interrompu à n'importe quel moment par un simili-événement provoquant un affaissement irréversible de ce mouvement-là, bientôt remplacé par un autre selon le même procédé.
"Mais moi j'absorbe la lumière par les yeux et par les oreilles, par la bouche et par le nez, et par tous les pores de la peau (...
La nature ou l'importance du point d'origine des simili-évènements décide de leur instabilité : ou bien ils engagent une remise en mouvement quasi-instantanée - dans un tel cas la période d'initialisation peut être considérablement raccourcie, ou bien ils entraînent une phase de latence semi-végétative, éventuellement dévoilée par une attention exagérée prêtée à des phénomènes mineurs, auquel cas le mouvement devra être à nouveau suscité.
...) Comme un poisson j'y trempe et je l'ingurgite. De même que les feux du matin et de l'après-midi mûrissent, dit-on, comme des grappes de raisin encore, le soleil pénètre mon sang et désopile ma cervelle."
Massacres en Tchétchénie :
la masse sacre Poutine !
Passation de pouvoir au Kremlin
:
Vas-y rase Poutine !
"Dieu est mort" signé
Nietzsche
"Nietzsche est mort" signé Dieu
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IRONIE : 4 rue de Chanzy - 75011 Paris